HIRONDELLES
LE SYMBOLE DE L'HIRONDELLE
Elles sont prêtes à partir. Leur vie a changé
depuis une quizaine de jours. Début septembre, les deux
dernières couvées se vidaient, les pillis apprenaient
à voler de leurs propres ailes. A présent, elles
sont toutes ensemble pour se gaver de mouches, tipules, moucherons,
moustiques, syrphes...Je les ai revues avant hier ; elles étaient
une cinquantaine autour de mes toits, comme pour un immense au-revoir
et un merci de leur procurer encore un logement (à prix
modéré...) alors que tant d'humains ne veulent
plus d'elles. J'ai ressenti cela comme un adieu et un merci à
la Vie : "mes" petites, les hirondelles, toutes là
pour "ressentir" encore et encore le lieu où
elles sont nées, peut -être le mémoriser
(?) parfaitement pour le retrouver dans 6 mois, dans le courant
de mars...
PARTIR-REVENIR
Hirundo rustica Linnaeus (1758) -hirondelle rustique ou de cheminée
à la gorge orange foncé : tel est le nom de celles
que je côtoie ici, mais le voisin, l'éleveur de
chevaux islandais, accueille des hirondelles de fenêtre,
qui nichent à l'extérieur, alors que les "miennes"
choisissent les boxes des chevaux ou la chèvrerie, à
défaut, car le plafond est bas et la lumière terne.
Certaines hirondelles parcourent
10000 km pour leur migration. C'est tout bonnement fabuleux quand
on sait qu'elles pèsent dans les 20 g. Elle retournent
dans les mêmes lieux en Afrique, et les mêmes lieux
en Europe. Ca aussi, ça tient du prodige. Elles peuvent
tenir 60 heures pour traverser d'une traite la Méditerranée...Elles
migrent en petits groupes. Les ornithologues savent énormément
de choses sur elles et c'est toujours passionnant de les regarder
vivre.
Avant, elles devaient hanter
les cavernes de nos ancêtres... Maintenant, comme leurs
effectifs se sont réduits, on en voit moins sur les fils
électriques. Posées dessus comme sur une portée
de musique, elles annoncent leur départ dans les quelques
semaines à venir.
PRINTEMPS AUX HIRONDELLES
On dit que sans elles, il n'y aurait pas de printemps, mais on
les accepte de moins en moins pourtant. Comme nous sommes contradictoires
!!! Quand elles arrivent, c'est la fête chez moi, je saute
en l'air et je les salue joyeusement. Un beau matin, elle est
là, la toute première, sans doute un mâle
venu en éclaireur préparer le nid pour sa gente
dame. Un beau matin, je vois une petite fusée noire jaillir
du box en lançant un "tssit" sauvage et effronté
d'alarme. Alors je sais que, durant 6 mois, de la mi mars à
la fin septembre (elles partent de plus en plus tard, vers le
30 septembre), je m'éclaterai à regarder toute
cette vie dans l'écurie et le ciel constellé de
mes petites "mouches" noires...
Elles utilisent toujours le
même nid, le rafistolant de poils de chèvres ou
de crins de cheval, de bourre de colley ou de plumes de tourterelles,
le consolidant de boue bien fraîche.
Ou bien alors elles en construisent
un autre ; chez moi, les fondations sont déjà posées
sous la forme de clous ou de bout de grillage. Je tiens toujours
de la terre mouillée à leur disposition, j'arrose
généreusement une partie de terrain pour elles
durant tout le printemps s'il ne pleut pas assez.
LES BÉBÉS
Après 15 jours de couvaison de la mère (le père
n'est jamais loin), une moyenne de 5 petits éclot. Plus
ils grandissent, plus les allers et retours se font pressants,
la marmaille réclame !!! Pour les nourrir, les parents
parcourent environ 300 km par jour pendant trois semaines...
J'adore me mettre devant les boxes et me faire raser la tête
par les allers et retours incessants... Elles arrivent en trombe
et hop là, en une seconde, toute une fournée d'insectes
est engloutie.
Puis, un beau jour, à
n'importe quelle heure, un petit plus costaud, sans doute le
premier né, se risque à voleter et sortir de l'abri
qui a bercé son enfance. Les autres le suivent et les
juvéniles se perchent non loin, attirant les parents par
leurs "grésillements" incessants. Que c'est
donc joli, ce spectacle de famille nombreuse ! Le père
ou la mère se repose parfois auprès d'eux, les
protégeant aussi. Une fois, alors que les jeunes gazouillaient,
un grand silence s'est fait. J'ai regardé le ciel et ,
là- haut, toutes les adultes mettaient en fuite un faucon
crécerelle qui volait trop près du lieu de reproduction.
Les petits observaient aussi les grandes qui poursuivaient le
rapace. Sans doute prenaient-ils une bonne leçon, si elle
n'était pas déjà inscrite dans leurs gènes
: tout ce qui ressemble à une grande faucille noire est
dangereux au dessus de nos petites frimousses !
L'ENVOL
Quand enfin, au bout d'une semaine environ, tout le monde sait
chasser et a bien musclé ses jeunes ailes, c'est le départ
vers les hauteurs et l'abandon total de l'enfance. Les petits
rejoignent le clan pour de bon et ne reviennent que pour se reposer
ou dormir dans les boxes, avec le reste de la troupe. Pendant
des mois, tous les soirs, des dizaines d'hirondelles logent chez
mes deux chevaux. Les autres adolescents des premières
couvées couchent dehors, mais les parents restent avec
les autres tout le temps de la nidification, jusqu'au début
septembre.
J'adore le moment où
les hirondelles fêtent l'envolée des jeunes par
de grands cris dans l'azur, sans doute pour les attirer plus
haut, les inciter à chasser de concert et, peut-être,
leur souhaiter la bienvenue dans le monde des ailes ?
COMMENT LES PROTÉGER
Bien sûr, il faut abandonner les bombes insecticides chez
vous, ne pas mettre de polluant chimique dans votre jardin, limiter
tout ce qui est toxique. L'agriculture intensive fait déjà
tant de ravages !!! Laisser de vieilles poutres ou un crépis
épais, où elles pourront accrocher leurs fondations.
J'ai acheté à la Ligue pour la Protection des
Oiseaux (LPO, Fonderies Royales, 8,10 rue Dr Pujos, BP 90263,
17305 Rochefort cédex ; tél : 05 46 83 95 86, refuges
LPO : 05 46 82 12 34) des nichoirs tout faits, mais elles ont
rajouté de la boue par - dessus. La LPO vous fournit tout
renseignement utile pour mettre vos nichoirs au bon endroit.
Sans cela, à une vingtaine de centimètres du plafond,
contre la poutre, on peut planter des grands clous ou mettre
des petites plate-formes de grillage. Il est aussi facile de
tendre de faux câbles électriques entre les poutres
pour faciliter le repos des parents auprès des bébés.
Laisser toujours une ouverture, bien sûr.
Il faut les aider, ce sont
de merveilleux oiseaux, qui nous font l'honneur de nicher dans
nos bâtisses ou sous nos toits (hirondelles de fenêtre).
Elles sont solidaires entre elles : Un mâle peut aider
un autre couple à finir son nid quand sa femelle commence
à couver "chez lui". (Vous reconnaissez le mâle
de la femelle au fait que celui-ci a les deux filets de la queue
beaucoup plus long).
SYMBOLIQUE
La troisième semaine du mois de septembre, mes amies hirondelles
sont rarement visibles. Je les sais activées à
se nourrir en prévision de la migration, survolant les
étangs et s'abreuvant en plein vol au raz de l'onde. Lorsque
elles me font l'honneur de revenir au-dessus de ma ferme, le
bonheur est assuré. Une cinquantaine d'oiseaux -moins
que dans l'été- s'élancent dans les airs,
virevoltent, s'esquivent, tournoient, font demi-tour soudain,
se frôlent, se côtoient et poussent leurs cris de
ralliement. Belles sont-elles ainsi, forces minuscules et bien
réelles de Mère Nature. Ainsi sont-elles apparues
au printemps si vite parti, ainsi se préparent-t'elles
à retourner dans l'éternel été qui
les nourrit d'insectes, loin, si loin, en terre d'Afrique...
Quand vient la saison des fleurs et des promesses de soleil,
nous revivons avec elles, ailes battantes à tire d'ailes...Nous
vibrons de lumière tous ces mois de chaleur et
de lumière... Puis nous devons rentrer dans nos maisons
et en nous-mêmes pour affronter la longueur de l'hiver,
privés des carrousels hirundinidés et des arabesques
célestes. Entre ces deux extrêmes, il y a le temps
de préparation des nids ou le moment de se gorger de nourriture
et de reconnaître l'espace où l'on reviendra. Initiées
au calendrier et à la géographie sans n'être
jamais allées à l'école, ces maîtresses
des azurs nous donnent une leçon d'humilité et
d'équilibre.
Ainsi naissons-nous et grandissons-nous,
puis nous préparons-nous doucement au long voyage qui
sera le nôtre au soleil de nos morts... Ainsi de tout temps
à jamais les battements d'ailes ont entonné le
chant des vies innombrables qui commencent, se développent,
mûrissent en leur belle saison puis repartent dans l'immensité
d'où elles sont venues.
Allez, mes soeurs, allez porter
la bonne nouvelle en Afrique, affrontez sans faillir les vents
et les orages maritimes, puis revenez-moi, je vous en conjure,
en un lieu qui sera toujours plus accueillant pour vous. Vous
êtes les battements de mon coeur ivre de liberté
et de vraie vie.
Une baisse de 84 % des hirondelles
de fenêtre a été répertoriée
en 10 ans... Alors, je parle de vous, voyez ; je fais connaître
votre grand courage, votre noblesse d'aile, votre coeur vaillant...
L'image de vos petits piaillant et agitant les plumes, le bec
grand ouvert, sur les fils près de mes fenêtres,
rythmera mes pulsations au profond des grands froids.
Bon voyage, mes hirondelles
chéries, bonjour à l'Afrique de ma part !!!
Leur statut juridique en france
En France, les hirondelles
et les martinets bénéficient d'un statut juridique
qui fait d'eux des oiseaux intégralement protégés.
Ce régime de protection est issu de la loi du 10 juillet
1976 sur la protection de la nature aujourd'hui codifiée
aux articles L 411-1 et suivants du code de l'environnement et
de l'arrêté ministériel du 17/04/1981 modifié
le 5/03/1999, fixant la liste des oiseaux protégés
sur l'ensemble du territoire.
- Pour ces oiseaux (poussins
ou adultes), sont interdits : la destruction, la mutilation,
la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle,
la naturalisation.
- et qu'ils soient vivants
ou morts : le transport, le colportage, la détention,
la mise en vente, la vente ou l'achat.
- pour les oeufs ou les nids
: l'enlèvement ou la destruction, ainsi que la destruction,
l'altération ou la dégradation de leurs milieux.
Tout responsable d'une infraction
s'expose à une amende pouvant aller jusqu'à 9 146,94
euros et/ou une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à
6 mois (art. L 415-1 du Code de l'environnement).
En conclusion, il est interdit
de porter atteinte aux hirondelles et aux martinets ainsi qu'à
leurs nids et couvées.
Extrait de la fiche réalisée
par le Service Juridique de la Ligue pour la Protection des Oiseaux
dans le cadre de l'année de l'hirondelle avec le soutien du Ministère
de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement.
LES REFUGES
LPO
Il est bien de faire de son jardin, de son balcon, pourquoi pas,
un refuge LPO : c'est un réseau national bien organisé
et tout le monde peut entamer cette action, ce qui permet aussi
plus facilement d'interdire la chasse chez soi. On reçoit
des panneaux que l'on place. Plus de 33 000 ha sont ainsi répertoriés
refuges de la nature, et il existe près de 13500 refuges.
Le propriétaire s'engage à utiliser des techniques
respectueuses de l'environnement, à poser des nichoirs
et mangeoires, abreuvoirs, et accueillir ainsi faune et flore
sauvage. On apprend à planter des fleurs pour attirer
les papillons, à mettre des abris pour les insectes. C'est
le premier réseau de jardins écologiques en France
et je vous conseille vivement, si vous voulez être utile
à l'environnement, à faire de votre jardin un tel
refuge pour la biodiversité si menacée de nos jours.
Hérissons, lézards, haies odorantes, prairies non
tondues, tout cela concourt à améliorer l'espace
de vie pour les tout petits. Des mini guides nous sont envoyés
pour conforter nos connaissances naturalistes et réaliser
nos premiers aménagements. On peut aussi contacter d'autres
membres. Il y a aussi la
boutique LPO où on trouve des nichoirs, des livres
et des jouets pour les enfants.
Je suis, pour ma part, allée un peu plus loin en créant
aussi "le Sanctuaire des Petits Animaux" sur
trois ha où je protège activement les petits animaux,
comme son nom l'indique. J'accueille des grenouilles dans de
petits bassins, les moineaux dans mes grappes de raisin (les
moineaux domestiques sont, contrairement à ce que l'on
pense, aussi menacés), les pies que je ne considère
pas comme nuisibles, des hérissons, couleuvres, renards
s'ils sont de passage, vanneaux huppés pendant la migration,
chouettes dans mes arbres, chevreuils de passage...J'ai de grands
vieux arbres, des prés, des haies sauvages et je laisse
la nature la plus libre possible. Des carrés d'orties
permettent aux papillons de pondre ; je ne tue pas les guêpes
et les araignées... Je tiens à ce que ma démarche
soit de plus en plus "contagieuse" dans ma commune,
elle est simple et accessible à toutes et à tous,
et j'espère bien "contaminer" du monde dans
les années à venir !!! L'écologie, pour
moi, commence par les tout-petits, qui étaient sur terre
avant nous !!!
Autres sites ORNITHOLOGIQUES
à visiter :
web-ornitho
Le monde de l'ornithologie - Valéry Schollaert
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